Extrait de l’intervention de Gilles Lipovetsky à la conférence
« Prendre de la hauteur avec l’expérience client » 2014.
« Nous sommes à l’heure où l’activité esthétique du capitalisme est devenue structurelle, exponentielle, présente dans tous les secteurs de la consommation marchande. Nous sommes à l’heure de la prolifération, de l’inflation esthétique portée par le capitalisme de l’hyperconsommation. J’ai proposé ce nouveau modèle du capitalisme : le capitalisme artiste, ou le capitalisme transesthétique.
Pourquoi ?
Parce qu’il se définit par l’incorporation systématique, structurelle du parallèle esthétique ou expérientielle dans tous les secteurs qui touchent à la consommation, ce qui veut dire que ça ne touche que les secteurs du capitalisme de consommation, et pas du capitalisme financier. Le capitalisme artiste, esthétique, touche le capitalisme de consommation. Cette dimension renvoie à toutes les opérations de décoration, de stylisation, de séduction des produits et de l’espace – magasins, centre commercial, restaurants, aéroports, centre-villes, gares, paysages – il n’y a plus un domaine qui échappe à cette incorporation de ce paradigme. Mais l’esthétique dépasse la simple
stylisation formelle ou visuelle. Ce n’est qu’un aspect. Esthétique doit s’entendre au sens grec originel, aesthesis qui veut dire perceptions, sensations, affects, émotions.
C’est ça la définition de l’aesthesis. Le capitalisme est ce système qui fait appel aux émotions, qui stimule les affects et les imaginaires, afin de faire rêver sans dire divertir.
Le capitalisme artiste, c’est le système qui construit ce que j’appellerais le marché de la sensibilité, les espaces de la sensibilité et donc il fonctionne comme une immense ingénierie du rêve, de l’émotion et de l’imaginaire. Voilà la définition. »
Mais l’esthétique dépasse la simple stylisation formelle ou visuelle.
Ce n’est qu’un aspect. Esthétique doit s’entendre au sens grec originel,
aesthesis qui veut dire perceptions, sensations, affects, émotions.Gilles Lipovetsky